Communiqué : Label « Ville Prudente » – Prévention Routière doit changer de méthode pour lutter effectivement contre l’insécurité routière

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A l’occasion de la cérémonie 2021 de remise du label  « Ville Prudente » par la Prévention Routière, l’association La Ville à Vélo publie une analyse qui démontre que les villes labellisées sont en moyenne plus dangereuses pour les piétons et les cyclistes. Ainsi, l’association Prévention Routière met en avant des communes dont la politique ne contribue pas à lutter effectivement contre l’insécurité routière. Pourtant, avec 55 754 blessés et 2 780 personnes décédées en France en 2020 sur la route, il est urgent que les élus locaux prennent leurs responsabilités.

Mercredi 17 novembre, l’association Prévention Routière annoncera le palmarès 2021 des villes labellisées « Ville Prudente ». Depuis 2018, ce sont 249 communes qui ont affiché le panneau à l’entrée de leur ville ou village. « L’objectif de ce label est de mettre en avant les communes les plus exemplaires en matière de sécurité et de prévention routières » peut-on lire sur le site www.villeprudente.fr. Pourtant, confronté aux chiffres du fichier national des accidents mis en ligne par l’Observatoire national interministériel de la sécurité routière (ONISR), le label « Ville Prudente » ne constitue pas un gage de sécurité pour les usagers de la route et interroge sur les méthodes retenues par Prévention Routière pour lutter effectivement contre l’insécurité routière.

– Les communes labellisées 1 à 3 cœurs du label « Ville Prudente » en 2018, 2019 et 2020 comptent en moyenne plus de piétons et cyclistes morts et blessés graves (AIS >= 2) sur ces 3 années que les communes non labellisées.

– Cette différence entre les communes labellisées et les communes non labellisées est stable depuis 2016, soit 2 années avant la première labellisation, et n’a pas évolué depuis : le label « Ville Prudente » n’est donc pas une preuve d’une politique plus efficace qu’ailleurs pour réduire les risques.

Sur le territoire de la métropole de Lyon et de la Communauté de Commune de la Vallée du Garon où agit La Ville à Vélo, les communes de Caluire-et-Cuire (2018), Chaponost (2018), Corbas (2018), St-Didier-au-Mont-d’Or (2018) et Tassin-la-Demi-Lune (2020) ont été labellisées. Pourtant, un cycliste est décédé en 2019 à Caluire-et-Cuire sur un carrefour très passant et non aménagé déjà dénoncé par les usagers et le nombre de blessés et d’accidents de Tassin-la-Demi-Lune en 2020 dépasse de 25% la moyenne des quatre années précédentes, malgré une forte baisse au niveau national. Aucune de ces deux communes n’a adopté la vitesse maximale de 30 km/h sur l’ensemble de sa voirie, et l’une comme l’autre sont dépourvues d’un réseau cyclable continu et structuré.

Frédérique Bienvenüe, coprésidente de La Ville à Vélo, déclare : « Les élus locaux doivent lutter sincèrement contre l’insécurité routière en aménageant la voirie pour réduire la vitesse à 30km/h maximum en ville et en généralisant les pistes cyclables séparées de la voirie et les rues piétonnes dans les centres des villes et devant les écoles. »

Le mécanisme d’attribution du label « Ville Prudente »

“Le conseil d’administration de l’association définit les règles du mécanisme (…) d’attribution du label” indique le règlement sur le site www.villeprudente.fr. Ce conseil d’administration réunit des représentants d’entreprises ou de fédérations d’entreprises liées à l’automobile (13 membres), des représentants d’associations d’usagers et de victimes (4 membres), des bénévoles de l’association (3 membres) et des associations de collectivités (2 membres). Siègent par exemple le Comité des Constructeurs Français d’Automobiles (CCFA) et le Conseil National des Professions de l’Automobile (CNPA).

Ainsi, pour se voir récompensées du label « Ville Prudente », les communes doivent renseigner un questionnaire d’évaluation – non public -, s’acquitter des frais de participation (70€), s’engager à adhérer durant les 3 prochaines années à l’association “même en cas de changement d’équipe municipale” (100€ à 1 350€/an) et être auditées par un référent de l’association lors d’une visite sur place ou d’une simple visioconférence afin d’effectuer “un bilan de conformité des réponses apportées”.

La procédure d’attribution est opaque et ne comprend aucun état des lieux contradictoire. Selon les déclarations mêmes de Prévention Routière rapportées par Le Progrès le 20 octobre 2021, la procédure ne prend pas en compte les chiffres de l’accidentologie. Quitte à mettre en avant des édiles dont la politique en termes d’aménagement de la voirie et de lutte contre l’insécurité routière ne protège pas effectivement les usagers de la route.

Les chiffres sur l’insécurité routière

Les confinements de 2020 ont conduit à un bilan de l’insécurité routière publié par l’ONISR exceptionnellement bas et pourtant dramatique : « En 2020, on dénombre 45 121 accidents corporels de la circulation en France métropolitaine. 2 541 personnes ont été tuées dans les 30 jours après leur accident, dont notamment 391 piétons, 7 usagers d’engins de déplacement personnel (tels les trottinettes électriques), 178 cyclistes, 100 cyclomotoristes, 479 motocyclistes, 1 243 automobilistes, 59 usagers de véhicules utilitaires, 33 usagers de poids lourds. »

L’ONISR établit que 85% des piétons et 55% des cyclistes tués en agglomération le sont par des voitures, des utilitaires ou des poids lourds (respectivement 224 sur 261 et 45 sur 81). De plus, 41% des piétons tués en agglomération se trouvaient sur un passage piéton (sur les 237 cas pour lesquels l’information est connue).

Si l’ONISR constate que « la mortalité cycliste a baissé de 5 % entre 2019 et 2020 (- 9 tués), malgré une hausse des déplacements de l’ordre de 10 % », cette amélioration peut essentiellement s’expliquer par la sécurité conférée par l’ouverture massive de pistes cyclables suite au 1er confinement et l’augmentation du nombre de cyclistes qui les rend plus visibles des automobilistes et des conducteurs d’utilitaires et de poids lourds.